Jean-Daniel Giauque, l’attrait de la terre

Le patron  du domaine du Signolet, à La Neuveville, a décidé de changer son fusil d’épaule en réduisant sa production de manière drastique. Rencontre avec un homme passionnant et passionné.

Avec Jean-Daniel Giauque,  on ne sait jamais à quoi s’attendre.  L’homme est chaleureux, passionné, mais aussi imprévisible, selon l’humeur du jour. Quand il  est en forme, le vigneron de La Neuveville est intarissable: ce jour de décembre 2017, installé au coin du feu de sa cave, il reconnaît avoir traversé récemment une période difficile. « Je dispose de 5 hectares de vigne, dont 3,5 en propriété.  C’est  beaucoup de travail, mais aussi beaucoup de pression pour vendre du vin en bouteille. Je n’ai plus envie. J’aime travailler la terre.  Vendre, ce n’est pas mon truc. Je n’aime pas ça. »

Du coup, Jean-Da, comme  on l’appelle couramment au bord du Lac de Bienne, a décidé de réduire sa production. Désormais, il entend vendre entre 2000 et  4000 bouteilles  positionnées dans le haut de gamme pour une clientèle d’habitués,  privés et restaurants. Une baisse drastique. « Dans le passé,  je  commercialisait de 40 000 à 50 000 bouteilles par millésime, précise-t-il. Je n’ai plus  l’énergie nécessaire. »

Pour  vivre, le patron du domaine du Signolet, qu’il  a crée en 1986, a besoin d’autres sources de revenus.  Il est aussi éleveur: il possède une vingtaine de moutons,  une  dizaine de vaches,  dont des bêtes de la race d’Hérens, des cochons laineux et des poules. Celui qui se décrit volontiers comme « un peu sauvage » se ressource à leur contact. « J’en ai besoin, dit le vigneron, qui  vend du son  raisin à des tiers, dont à Steve Bettschen, négociant de grand talent.

Toujours installé dans la ferme familiale où son père pratiquait la polyculture (raisin, bétail, arbres fruitiers), Jean-Daniel Giauque est un ampélographe reconnu. Il est capable d’identifier plusieurs centaines de cépages du premier coup d’œil, talent qui lui a permis d’obtenir plusieurs mandats à  l’étranger. Il explique cette aptitude par sa capacité à se concentrer sur ce qui le passionne. « Je dois  être un peu Asperger », estime-t-il, faisant  référence à une forme d’autisme qui concerne des sujets peu sociables, intelligents et au bénéfice d’une mémoire remarquable.

Sa passion pour les cépages l’a poussé à créer une pépinière qui comprend plus de 100 variétés différentes. Parmi elles, des curiosités, comme le blanchier, ou gros bourgogne, relique hongroise qui a presque totalement disparu: selon  l’ouvrage « Les cépages suisses, histoires et origines » du généticien de la vigne José Vouillamoz,  il subsiste moins de 1 hectare dans le Haut-Valais. « J’ai greffé 1000 plants, souligne Jean-Daniel  Giauque.  Cela fait  15 ans que je travaille là-dessus. »

A la cave, Jean-Daniel Giauque est rigoureux, avec une tendance naturelle à l’expérimentation. «Par le passé, cela a entraîné quelques  irrégularités», reconnaît-il humblement en soulignant qu’il n’a pas fait d’études d’œnologie. «Mais avec 30 ans de métier, j’ai acquis un bagage important.»

Le vigneron-encaveur bernois propose une gamme resserrée avec quelques pépites. Parmi elles, une très belle altesse 2015, tout en tension avec des  arômes délicats de fruits exotiques. Ou encore « No 1 », pinot noir du millésime 2015 subtil et profond et plusieurs vins jaunes qui dorment au fond de sa cave. Une adresse incontournable pour les connaisseurs aimant les vins qui sortent des sentiers battus.

Renseignements: lesignolet@bluewin.chwww.lesignolet.ch