La bondola, un patrimoine à sauvegarder

Historiquement hégémonique au nord du Tessin, le cépage a été peu à peu remplacé par le merlot. L’association Slow Food s’engage pour le protéger.

Avec un peu moins de 15 000 hectares répartis dans toute la Suisse, la vigne fait intimement partie du paysage national. Ces 50 dernières années, le vignoble a connu une révolution silencieuse: de nouvelles variétés de raisins ont remplacé des variétés locales, moins productives ou plus fragiles. C’est le cas de la bondola, cépage rouge originaire du nord du Tessin, menacé de disparition. «Dans les années 1950, elle recouvrait encore plus de 50% du vignoble du Sopraceneri», souligne Giorgio Rossi, vigneron à Sementina, qui en possède un demi-hectare, ce qui fait de lui le plus gros producteur du Tessin.

Le rosé, c’est le tube de l’été!

Le vin à la robe pastel ne cesse de gagner des parts de marché. Les crus suisses progressent aussi, tout en gardant leurs spécificités.

C’est une vague couleur saumon qui emporte tout sur son passage, bousculant les codes du marché viticole. Malgré un tassement pendant l’épidémie de Covid-19, le rosé progresse un peu partout. C’est le cas des Etats-Unis mais aussi en France, à la fois plus grand producteur et plus grand consommateur de rosé. 

Ce dernier représente désormais plus de 30% de la production nationale alors qu’il n’atteignait pas 10% il y a 20 ans. Porté par la Provence, ce développement spectaculaire touche aussi la très aristocratique Champagne, où les ventes de bulles à la couleur rosée ont doublé en dix ans.

On craque pour… un rosé qui casse les codes

Le millésime 2022 assume pleinement son statut. Il est suggéré de le boire «avec des glaçons et des feuilles de menthe fraîche».

A Neuchâtel, l’œil-de-perdrix est une institution. Le rosé emblématique représente la moitié de la production des 335 hectares de pinot noir récoltés dans le canton. Selon les chiffres de l’Office cantonal de la viticulture, ce ratio est stable depuis 10 ans. Le succès du rosé de Provence n’a pas eu d’impact sur les volumes produits, contrairement à la plupart des autres régions viticoles. 

Châtelain en Dézaley

En 2020, Arthur Duplan a reçu les clés du domaine viticole créé autour de la tour de Marsens, au cœur du vignoble historique de Lavaux. Un sacré défi pour cet œnologue venu au vin par passion

C’est un joyau, un morceau de patrimoine viticole inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Surplombant le Léman, le vignoble du Dézaley a été structuré par les extensions et les reculs du glacier du Rhône. Il y a presque un millénaire, des moines cisterciens ont défriché ses pentes abruptes pour ériger des centaines de kilomètres de murs de pierre afin de planter la vigne en terrasses.

Au cœur de ce vignoble héroïque, la tour de Marsens découpe sa silhouette crénelée. C’est là, au bout d’un chemin de vigne abrupt, qu’Arthur Duplan, 26 ans, travaille depuis l’automne 2020. Fraîchement diplômé de la Haute Ecole de viticulture et d’œnologie de Changins, il a repris la gestion du domaine viticole créé la même année. Jusque-là, la vendange issue des deux hectares de vignes était vendue à un négociant, sans mention de sa proximité avec l’édifice médiéval.

Les champions suisses de dégustation à l’aveugle visent un 3e titre

Comment s’entraîne-t-on à reconnaitre des vins lors d’une dégustation à l’aveugle? Nous avons suivi les doubles champions suisses en titre lors d’une soirée d’entrainement.

La dégustation à l’aveugle par équipes, c’est comme le football, le scrabble ou la pêche au gros, il faut s’entraîner pour progresser. Doubles champions suisses en titre de la discipline et qualifiés pour les Mondiaux, où ils ont terminé 9es l’automne dernier, les Genevois Damien Mermoud, Pierre-Emmanuel Fehr, Dorian Pajic et Tristan Frésard l’ont bien compris, ils se retrouvent tous les lundis soir chez le premier, vigneron à Lully, pour une séance de travail. Au programme: la dégustation de douze bouteilles mystères, dûment chemisées. 

Le räuschling, un trésor alémanique

Le cépage blanc zurichois fait partie des variétés autochtones helvètes, mieux armées que les plants importés pour répondre aux défis du réchauffement climatique.

e sont des résistants qui ont failli disparaître, victimes d’une viticulture qui a longtemps eu pour seule obsession de faire du volume. Heureusement, les temps changent: les cépages autochtones, qu’ils soient suisses, italiens, grecs ou autrichiens, connaissent un nouveau souffle depuis un quart de siècle. C’est le cas des spécialités valaisannes comme l’amigne, l’arvine ou le cornalin, qui occupent aujourd’hui 600 hectares en Valais (soit 13% du vignoble), pour seulement 120 hectares en 1991.

C’est aussi le cas du completer grison, de la bondola tessinoise ou du räuschling, spécialité typiquement zurichoise. Issu du croisement du savagnin du Jura et du gouais blanc du nord est de la France, il est né dans le sud de l’Allemagne. Comme le détaille l’ampélographe José Vouillamoz dans son livre «Cépages suisses, histoire et origines», il a progressivement disparu des vignobles allemands et alsaciens pour survivre exclusivement en Suisse, malgré un arrachage à large échelle dès la fin du 19e siècle. Il recouvre aujourd’hui 26 hectares en Suisse alémanique, dont 20 dans le canton de Zurich.

La biodynamie, de la vigne au verre

Le vigneron de Féchy Raymond Paccot a adopté la méthode culturale en 1999. Il estime qu’elle lui a permis de gagner en qualité, avec des vins qui offrent plus de fraîcheur et de buvabilité.

Dans le petit monde de la viticulture suisse, Raymond Paccot fait partie des incontournables. Avec, souvent, un rôle de pionnier: à la fin des années 1980, le vigneron de Féchy a séparé la vendange de certaines parcelles pour produire les chasselas de terroir En Bayel, le Brez et le Petit Clos, avec pour chacun une expression propre; en 1999, il a fait partie des premiers vignerons suisses à adopter les principes de la biodynamie, avec notamment le Valaisanne Marie-Thérèse Chappaz. 

Pour cet esthète curieux et passionné, le déclic s’est fait progressivement. «En 1986, j’ai gagné le prix de meilleur chasselas de Suisse avec En Bayel. C’était un millésime difficile, j’avais beaucoup travaillé à la cave. C’était un vin technique, traité au charbon. La vendange n’avait pas été respectée dans son intégrité. Je ne voulais plus faire ça. Je voulais pouvoir travailler de manière plus sereine.»

Le Valais au sommet du hit-parade des chasselas romands

Souvent arraché, le fendant sait encore séduire, comme le montre une dégustation à l’aveugle de 16 cuvées issues du très difficile millésime 2021.

Plus le chasselas recule, plus il progresse. Cela peut sembler contradictoire, mais c’est une réalité objective. En 2021, le cépage identitaire de la Suisse romande recouvrait 3570 des 14 600 ha du vignoble helvète, contre 6 700 ha en 1986, soit une baisse de plus de 50%. 

Près de 1000 ha ont disparu ces quinze dernières années, dont une grande partie en Valais, avec le soutien de primes à l’arrachage versées par la Confédération. Ce recul spectaculaire a coïncidé avec un saut qualitatif favorisé par les progrès œnologiques, mais aussi par la nécessité de faire face à la concurrence accrue des vins blancs étrangers. Longtemps confiné dans le rôle de vin de soif, le chasselas a appris à se faire désirer. 

Un repas de gala pour célébrer 40 ans d’amitié

Raymond Paccot a fêté simultanément l’anniversaire de sa collaboration avec l’Hôtel de Ville de Crissier et la remise des clés du domaine à sa fille Laura.

40 ans, ça se fête ! Pour célébrer quatre décennies de collaboration avec l’Hôtel de Ville de Crissier, Raymond Paccot a organisé le 23 février un repas anniversaire avec l’actuel maître des lieux, Franck Giovannini. Une bonne habitude : le vigneron de Féchy avait déjà marqué le coup pour les 30 ans avec un repas « 9 étoiles » réalisé par le « cuisinier du siècle » Frédy Girardet encadré par ses successeurs, les regrettés Philippe Rochat et Benoît Violier. J’y étais déjà et garde un souvenir ému de cette soirée extraordinaire, comme je l’avais partagé avec les lecteurs du Temps.   

Pour le 40e, Frédy Girardet était présent avec son épouse. Le cuisinier, qui a fêté ses 86 ans en novembre dernier, n’a rien perdu de sa verve et de sa passion du goût. L’accord entre la Colombe Grise Réserve 2012 et le foie gras de canard poudré au balsamique des Alpes bernoises, pickles de choix-fleur et topinambour de Noville a été son coup de cœur de la soirée. « Un très beau mariage ! »

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Santé: «Il faut arrêter de diaboliser la consommation de vin»

Le Dr Rifler défend avec passion les vertus du vin comme partie intégrante du régime crétois. Et fustige l’hygiénisme ambiant.

Boire du vin pour rester en bonne santé. C’est le conseil iconoclaste du Dr Jean-Pierre Rifler, urgentiste et auteur de l’ouvrage «Les vertus du vin», publié l’automne dernier aux éditions Favre. Il faut dire que le médecin bourguignon est tombé dans le vin quand il était petit, comme il l’écrit dans le préambule. Il a découvert le vin avec son ami Vincent, fils de vigneron à Chablis. Au terme de ses études de médecine, il rédige sa thèse sur les effets bénéfiques des polyphénols des vins rouges, dont les tanins, les anthocyanes ou les stilbènes, dont le resvératrol.

Cofondateur de l’association Nutrition Méditerranéenne et Santé, le Dr Rifler ne nie pas les méfaits d’une consommation exagérée d’alcool. Mais il fustige l’hygiénisme ambiant qui, selon lui, a entraîné «une diabolisation de la consommation de vin». Entretien.